L'Homme Thermomètre by Laurent Cohen

L'Homme Thermomètre by Laurent Cohen

Auteur:Laurent Cohen [Cohen, Laurent]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Science, Life Sciences, Neuroscience
ISBN: 9782738182968
Éditeur: Odile Jacob
Publié: 2007-12-31T23:00:00+00:00


Le temps

Le scénario résumé dans la figure 27 (voir hors-texte) est plausible, d’une simplicité séduisante, mais il reste encore flou par bien des aspects. Il y a en particulier un gros problème de chronologie. Ce que l’IRM fonctionnelle nous dit, c’est qu’un certain nombre de régions s’activent au cours de la lecture (V4, la forme visuelle du mot…), mais elle ne nous dit absolument pas dans quel ordre. Par exemple, j’ai supposé que V4 s’allume avant la forme visuelle du mot, mais pour l’instant rien ne me le prouve. Les flèches de cette figure 27 sont tout à fait hypothétiques.

C’est pour cela que nous avons intégré à l’étude décrite tout à l’heure l’enregistrement de potentiels évoqués de haute densité57. Nous espérions que chaque méthode apporterait ce qu’elle a d’unique : résolution spatiale pour l’une, résolution temporelle pour l’autre. Nous avons placé sur la tête de nos sujets une sorte de filet élastique maintenant en place pas moins de 128 électrodes, chacune constituée d’une tige d’argent prolongée d’une petite éponge mouillée placée au contact de la peau. Nous avons alors demandé aux sujets coiffés de ce chapeau électrique de réaliser la même tâche qu’auparavant : lire dans leur tête des mots présentés brièvement dans la moitié droite ou la moitié gauche de leur champ visuel. En fait, certains des stimuli étaient de vrais mots, d’autres étaient des suites illisibles de consonnes, comme GTSPK ou FTSZQC.

Nous avons tout d’abord observé qu’une onde négative survenait environ 150 ms après la présentation d’un stimulus, sur l’arrière de l’hémisphère droit quand les mots étaient présentés à gauche et sur l’arrière de l’hémisphère gauche quand les mots étaient présentés à droite. Cette onde correspond probablement à une analyse perceptive assez précoce, comme celle que fait la région V4. À ce moment, les ondes évoquées par de vrais mots et par des chaînes de consonnes sont absolument identiques. Ce n’est pas étonnant : d’un point de vue purement visuel, rien ne les distingue. C’est ensuite que se passent les choses les plus intéressantes. Environ 200 ms après la présentation d’un stimulus, soit 50 ms après l’étape précédente, le tableau change du tout au tout. Nous voyons, en regard d’électrodes temporales gauches, et gauches seulement, une onde négative qui est identique, que les mots aient été présentés d’un côté ou de l’autre. En d’autres termes, cette onde est invariante pour la position spatiale, invariante comme l’était le foyer observé en IRM à la fameuse position x = – 45, y = – 60, et z = – 10, invariante… comme l’est par définition la forme visuelle du mot. Ce n’est que plus tard encore, au-delà de 200 ms, qu’on voit émerger sur les électrodes hémisphériques gauches une différence entre mots réels et paquets de consonnes. À partir de ce moment, le mot est sorti du domaine de la vision et entré dans celui du langage : son sens, sa prononciation deviennent accessibles, alors que le paquet de consonnes reste irréductiblement opaque.

Nous pensons avoir observé la signature électrique de l’allumage de la forme visuelle à un instant précis au cours de la lecture d’un mot.



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